Entretien avec Antoine Berthou ; économiste-chercheur à la Banque de France, Service d’étude sur la compétitivité et les échanges extérieurs ; qui animait en juin 2017 notre réunion sur le thème : « faire du financement des ventes à l’export un facteur de succès à l’international ».
Quel est l’impact du financement des entreprises sur leurs performances à l’exportation ?
Si l’on considère les principaux déterminants de la performance à l’exportation, le financement a un impact à la fois sur la compétitivité prix, via les coûts du capital et les conditions de financement des contrats export, et sur la compétitivité hors prix, avec le financement de l’exportation et les délais de paiement consentis à l’acheteur. Les conditions de financement de l’importateur et la qualité du système bancaire du pays visé ont bien sûr également une influence sur le succès de l’exportation.
Quels sont les éléments les plus déterminants ?
Le financement de la croissance de l’entreprise est le premier élément qui va la pousser à exporter. Plusieurs travaux ont montré que la santé financière des entreprises joue favorablement sur l’exportation. On constate également que les entreprises endettées ou rencontrant des problèmes de trésorerie sont moins exportatrices. Plus d’une entreprise sur cinq affirme d’ailleurs que le principal frein à sa croissance ou à son innovation est constitué par des contraintes financières. Ensuite, les conditions de crédit offertes par l’exportateur à ses clients (délais de paiement, taux) représentent un élément important de la compétitivité, tout particulièrement sur les secteurs les plus concurrentiels.
Quels sont les enjeux du financement de l’exportation ?
Entre 80 et 90 % du commerce mondial dépend d’instruments de « trade finance », c’est-à-dire d’instruments de financement spécifiques à l’exportation.
A l’international, les contrats de type « open account », intégrant des délais de paiement pour l’acheteur, sont largement majoritaires. Ils requièrent pour l’exportateur une trésorerie suffisante et impliquent davantage de risques. Les « contrats intermédiés », via des lettres de crédit, permettant de sécuriser les transactions, et les contrats « cash in advance », où l’importateur paye la marchandise en avance, sont moins utilisés.
Quel est le rôle des banques dans cette problématique ?
Outre leur contribution au financement de la croissance de l’entreprise, le rôle des banques est primordial pour financer l’exportateur (crédit fournisseur, préfinancement) ou l’importateur (crédit acheteur), et aussi pour mettre en place, dans certains cas, des instruments de couverture contre le risque de change ou des lignes de cautions.
Les chocs financiers subis par les banques tendent à modifier la performance à l’exportation de leurs clients. Des problèmes de financement export des entreprises françaises ont également été mis en évidence dans plusieurs rapports, notamment par le Medef et l’Inspection Générale des Finances. Ils posent la question de l’adaptation de l’offre des banques aux besoins des exportateurs, en particulier des PME.