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Y aurait-il une part de chance dans le succès à l’exportation ?

Y aurait-il une part de chance dans le succès à l’exportation ?

Pour expliquer l’hétérogénéité des stratégies à l’exportation des PME à partir de l’analyse statistique des données douanières, Isabelle Mejean, professeure d’économie à l’Ecole Polytechnique, introduit la notion de chance ou d’aléa, liée à la facilité ou à la difficulté de rencontrer des acheteurs. Entretien.

Quel est aujourd’hui l’état de l’art sur les stratégies à l’exportation ?

Depuis le début des années 2000, l’analyse statistique des données douanières a permis de mettre en évidence une très grande diversité des stratégies des entreprises sur les marchés internationaux. Il existe un ensemble de « faits stylisés » que l’on retrouve dans tous les pays étudiés. D’abord, les entreprises exportatrices sont très minoritaires, la très grande majorité des entreprises n’exportent pas directement. Ensuite, les entreprises qui exportent sont significativement plus grandes que la moyenne : elles emploient plus de salariés et génèrent plus de valeur ajoutée. Une petite minorité de « gros exportateurs » est responsable de la très grande majorité du commerce international.

Quels sont les déterminants de ces stratégies d’exportation ?

L’hétérogénéité des comportements à l’exportation est fortement corrélée à la « productivité », utilisée comme une mesure de la compétitivité-prix de l’entreprise. Certains éléments de compétitivité « hors-prix », comme la qualité des produits, contribuent également au succès à l’exportation. On constate aussi que les exportateurs sont relativement nombreux sur les marchés « faciles » (Belgique, Allemagne, Royaume-Uni, etc.), alors que les pays « difficiles » – très éloignés et/ou de petite taille (comme le Togo ou le Kirghizstan) – sont servis par un tout petit nombre d’entreprises. Mais cette sélection est beaucoup moins marquée pour les PME, parmi lesquelles, par exemple, la propension à exporter vers les Etats-Unis ou vers le Mali est similaire. Un fait statistique qu’aucun modèle ne pourrait prédire, le premier marché apparaissant clairement comme plus attractif que le second. Dès lors, comment expliquer ces résultats ? C’est là qu’intervient cette idée de « chance ».

De quelle « chance » s’agit-il ?

Dans un modèle statistique, la « chance » ou l’aléa correspond à tout ce que l’économètre ne peut pas observer directement. Pour des PME sans grande notoriété, la rencontre d’acheteurs potentiels peut être déterminée par des éléments non observables : le dirigeant de l’entreprise a une connaissance personnelle d’un marché, le commercial a croisé un prospect étranger dans un salon… Pour quantifier cet aléa, il s’agit de construire un modèle permettant de prédire la manière dont cet aléa va affecter les flux de commerce, puis de confronter aux données les prédictions de ce modèle. Nous essayons notamment de voir si la nationalité des employés peut avoir un impact sur la probabilité d’exporter vers une destination…

Quelles sont les conséquences pratiques de vos recherches ?

Pour expliquer les comportements à l’exportation des PME, il faut réfléchir au-delà de la simple compétitivité prix et hors-prix. D’où l’efficacité potentielle des programmes d’aide à l’export ciblés sur la rencontre…

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