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Consortium d’exportateurs italiens : étude du cas Cermac, une success story made in Italy

Consortium d’exportateurs italiens : étude du cas Cermac, une success story made in Italy

Comment un consortium export peut-il contribuer à identifier et développer des opportunités à l’international  pour les entreprises  ? Entretien avec Enrico Turoni, dirigeant du cabinet TR Turoni et président du Consortium Cermac, qui rencontre un grand succès dans le secteur agroalimentaire et des fruits et légumes en particulier, grâce à une démarche audacieuse et inspirante.

Quelles sont la vocation et l’activité du Consortium Cermac ?

Enrico Turoni : Cermac est un consortium pour l’internationalisation, formé dans les années 1980 par un groupe d’entreprises, toutes hautement spécialisées dans la fabrication de produits, outils, accessoires, machines et technologies pour l’agriculture et l’agro-industrie. L’activité principale de Cermac est la promotion à l’étranger des produits de ses entreprises membres. C’est un consortium de promotion et non de vente : nous ne vendons pas les produits ensemble, nous créons des opportunités pour que nos membres puissent rencontrer des clients potentiels sur des marchés étrangers. Rien n’empêche néanmoins que les membres traitent ensemble certaines demandes.

Qui sont, plus précisément, les entreprises membres de Cermac ?

E. T. : Cermac regroupe environ 30 entreprises italiennes, qui font partie des leaders mondiaux dans la fabrication de machines et de technologies pour l’agriculture. La gamme de produits est très large et va de la pré-récolte à la post-récolte, fournissant des technologies innovantes et des solutions avancées pour toute la chaîne de culture et de transformation des fruits et légumes, du champ à l’assiette. Cermac couvre toute la chaîne agricole : machines fruitières, pépinière et semences, engrais, préparation du sol et semis, matériel horticole, machines de plantation, irrigation, technologies post-récolte, transformation des fruits frais, accessoires, instruments scientifiques pour les analyses…

Il nous semble difficile  d’augmenter le  nombre de membres car nous préférons ne pas avoir d’entreprises concurrentes au sein de notre Consortium. Sans concurrence, il est en effet plus facile d’échanger des informations et de créer des partenariats.

Où sont situées les entreprises membres du Consortium ?

E. T. : La plupart des entreprises membres de Cermac sont situées dans la région Émilie-Romagne, qui a été baptisée « Vallée alimentaire italienne ». Celle-ci possède en effet une excellence agro-industrielle pour les machines agricoles, la technologie post-récolte et la transformation des aliments. Dans un rayon de 60 km autour de Bologne sont implantés de nombreux leaders mondiaux dans différentes technologies, ainsi qu’une université et des centres de recherche. Il s’agit donc d’un consortium régional, financé par la Région, même si celle-ci nous autorise à avoir jusqu’à 25% des entreprises du Consortium s  ce qui nous permet de rassembler l’ensemble de la chaîne des technologies de notre secteur.

A quels types de clients sont destinées les solutions et technologies proposées par les membres du Consortium ?

E. T. : Nos technologies sont destinées à des entreprises et à des pays qui exportent des fruits et légumes, car pour exporter, il faut satisfaire un certain nombre de , ce qui nécessite l’emploi d’un certain nombre de technologies. Nous travaillons également avec des pays où le secteur du retail est bien développé, car les détaillants veulent acheter des fruits et légumes sains et de qualité uniforme, qui peuvent être obtenus avec les technologies de nos membres. En effet, exporter des fruits et légumes et approvisionner le secteur de la vente au détail nécessitent différentes étapes : planifier la production ; différencier les variétés de fruits et légumes ; choisir la bonne variété ; utiliser des emballages et des étiquetages spécifiques ; optimiser le stockage et le transport ; améliorer la qualité des produits ; respecter les règles exigées par le marché (traçabilité alimentaire). Les entreprises membres de Cermac permettent ainsi à ce secteur  d’améliorer sa compétitivité sur le marché mondial et auprès de la grande distribution grâce à l’utilisation de technologies avancées dans toutes les phases de la chaîne, depuis les champs jusqu’au lieu de vente.

Quelles sont les actions mises en oeuvre par le Consortium pour créer des opportunités de ventes à l’international pour ses membres ?

E. T. : Les actions sont nombreuses et diversifiées. Tout d’abord nous participons à de nombreux salons et nous réalisons des missions commerciales collectives à l’étranger. Nous organisons des événements BtoB avec des partenaires étrangers, en Italie ou dans les pays visés. Cela peut être en présentiel ou en visuel.

Nous organisons également des opérations d’essais et de démonstration sur le terrain. Il est important que nos prospects puissent voir nos machines et notre technologie à l’œuvre en situation réelle.  :  Nous envoyons parfois notre solution et nos équipements à un partenaire étranger, afin que nos clients potentiels puissent commencer à les utiliser, voir comment la technologie fonctionne, quels résultats elle apporte. Nous avons notamment utilisé ces « opérations de test » en Tunisie, en République dominicaine, et dans plusieurs pays d’Amérique du Sud (Colombie, Pérou, etc.). C’est très important parce que dans notre secteur, les gens veulent « toucher » les produits. Bien sûr, nous devons trouver le partenaire qui paiera cette opération car il y a des coûts associés, et en général nous y parvenons.

Nous réalisons aussi des études pour l’adaptation locale de nos technologies et leur utilisation dans des situations spécifiques, car les sols, le climat et les exploitations agricoles diffèrent d’un pays à l’autre. Nous nouons également des partenariats à l’étranger avec des instituions publiques ou privées. Nous avons par exemple signé un partenariat avec le ministère de l’Agriculture de l’Ouzbékistan, avec un centre de recherche au Panama, et nous travaillons actuellement avec le gouvernement du Chili. Il s’agit d’échanger des informations sur les technologies, les programmes de formation, etc. Nous pouvons co-développer certains produits et solutions pour répondre à des besoins locaux. Nous apportons aussi une aide à la décision aux entités publiques. Par contre, nous ne vendons pas directement de marchandises ; nous sommes un consortium export et non un consortium de ventes. L’échange, le partage d’informations et la coopération sont très importants dans notre Consortium, aussi bien entre les membres qu’avec les acteurs externes. 

Qui apporte du soutien à Cermac ?

E. T. : Notre groupement a régulièrement répondu à des projets d’appels à consortiums, par exemple en 2023, avec de nombreuses actions éligibles à du financement : appel à un manager export externe, à un digital manager externe, financement de prestations de conseil, réalisation de vidéos promotionnelles, marketing digital, participation à des salons internationaux… Notre Consortium reçoit principalement un soutien de la région Émilie-Romagne. Nous bénéficions également d’un soutien des Chambres de Commerce et/ou de son réseau national, ainsi que d’un appui national (ICE, ministères, etc.), par exemple l’an dernier pour notre activité digitale. Dans le passé, nous avons aussi bénéficié de l’ECIP, un instrument financier de l’Union européenne. Il y a trois ans, nous avons obtenu une aide de la Région Émilie-Romagne de 300.000 euros. La Région a financé jusqu’ici le Consortium à hauteur de 40 à 50 % de son budget. La souscription annuelle payée par les entreprises pour être membre du Consortium varie selon la taille de la société : une grande entreprise paie autour de 4.000 euros, une PME située hors de la région Emilie-Romagne paie environ 2.000 euros, et une PME de la région Emilie-Romagne paie un peu plus de 1.000 euros.

Quels sont les points forts de Cermac ?

E. T. : D’abord, Cermac est une référence dans son domaine ; la chambre de commerce de la Région Émilie-Romagne nous contacte régulièrement sur ses projets concernant notre secteur. Ensuite, nous développons une approche innovante pour créer en permanence de nouvelles opportunités à l’international pour nos entreprises membres. Et pas seulement pour les PME, mais aussi pour de grandes entreprises. Autre point fort : les offres de technologies de nos membres sont complémentaires et non concurrentes. Nous pouvons donc proposer un « guichet unique » (« one-stop-shop ») pour nos clients. Et dans le futur, nous avons l’ambition de développer des « projets clés en main ».

Nous aidons notamment nos membres à saisir des opportunités sur des marchés difficiles, sur lesquels ils auraient du mal à entrer seuls ; nous avons par exemple en ce moment un projet en Irak.

Enfin, il est important de dire que nous n’avons pas une « vision bureaucratique » mais sommes au contraire pragmatiques et proches des besoins du terrain ; nous allons sur un marché étranger s’il y existe de réelles opportunités pour nos membres et non parce qu’il sera bien vu d’y aller.

De plus, les avantages et les bénéfices que nous apportons vont au-delà des seuls membres de Cermac et nos actions peuvent en effet profiter à d’autres entreprises car nous plantons le drapeau du “Made in Italy” sur des marchés parfois difficiles à ouvrir.

Enfin, Cermac est également partenaire minoritaire d’un salon international, et apporte une expertise en internationalisation qui profite aussi à la Chambre de commerce et au ministère.

Quels vous semblent être  les points faibles du Consortium ?

E. T. : Parfois, notre position n’est pas alignée avec celle des décideurs politiques et administratifs ; ils nous adressent des consignes car ils nous co-financent mais leur vision n’est pas toujours suffisamment commerciale. Par exemple, en Colombie, ils voulaient que nous organisions un salon avec 55 entreprises italiennes à Bogota parce que leur bureau était à Bogota, mais nous avons préféré l’organiser à Medellin, où se trouvaient effectivement nos clients potentiels.

Par ailleurs, Cermac reste clairement dépendant de l’aide publique pour assurer son fonctionnement, et il est aujourd’hui plus difficile d’obtenir des aides financières après les dépenses massives réalisées pour lutter contre le Covid-19.

Comment voyez-vous l’avenir de Cermac ?

E. T. : A court terme (deux ou trois ans), il n’y aura aucun problème. Mais à moyen et long terme, il faudra trouver une source régulière de financement, notamment pour mieux structurer le Consortium ; en tant qu’animateur du consortium je suis rémunéré par un forfait annuel mais, par exemple, le secrétariat du Consortium est à ce jour assuré par celui de mon entreprise. Il s’agira également pour le Consortium d’évoluer de plus en plus vers un rôle de prestataire, de fournisseur de services.

de régions limitrophes ou de partout ailleurs en Italie?

c’est souvent plus que des standards mais des normes auxquelles les entreprises doivent se conformer dans plusieurs pays.

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